Champ, pièce, parcelle - Annexe 1

De Les Mots de l'agronomie
Date de mise en ligne
30 mai 2013
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Cette annexe se rapporte à l'article Champ, pièce, parcelle.

Taille des parcelles et signification des rendements

Auteur : François Sigaut

Le rendement par unité de surface : question d’échelle

Plaçons-nous tout d’abord dans un cas qui nous est familier : celui d’un champ uniformément cultivé et ensemencé. On pourrait penser que, dans ce cas, le rendement est indépendant des dimensions de la parcelle. Il n’en est rien, et pour deux raisons dont l’une est purement physique, c’est l’effet de bordure. L’autre raison est bien connue, c’est le fait qu’une petite parcelle est toujours mieux soignée et mieux protégée qu’une grande, si bien que les résultats obtenus “en petit” ne sont que rarement transposables “en grand”. La littérature des XVIIIe et XIXe siècles est remplie de critiques et de mises en garde contre l’extrapolation abusive de résultats d’expériences faites “en petit” ; ces mises en garde restent parfaitement valides aujourd’hui.

Mais c’est sur l’effet de bordure, bien connu des expérimentateurs, que je voudrais insister ici, à cause de son caractère physique, inévitable. A l’intérieur d’un champ uniformément ensemencé, chaque plante est entourée d’autres plantes qui limitent l’espace dans lequel elle peut prélever l’eau et les éléments fertilisants, et qui limitent également la quantité de lumière qu’elle reçoit. Au bord du champ, il n’en est plus ainsi, les plantes qui y sont situées peuvent étendre davantage leurs racines et reçoivent davantage de lumière, elles prennent donc ordinairement un développement plus grand.

Supposons que l’effet de bordure se fasse sentir sur 2 m de profondeur. Une parcelle carrée de 16 m2 en sera entièrement affectée et pourra donc de ce seul fait donner un rendement très supérieur (jusqu’au double peut-être) à celui d’une parcelle carrée de 1 ha dans laquelle moins de 10% de la surface est affectée.

Voilà donc deux échelles différentes, celle de la “petite” parcelle (quelques dizaines de mètres carrés) et celle de la “grande” (de l’ordre d’un hectare), pour lesquelles le rendement à l’unité de surface n’a pas la même signification.

Il faut noter d’ailleurs que dans la plupart des agricultures non mécanisées, c’est la “petite” parcelle qui est la règle et non la grande : celle-ci n’apparaît sous sa forme actuelle qu’au XIXe siècle. Il existe certes des champs de grandes dimensions depuis l’apparition de l’araire au IVe millénaire av. J.-C. Mais la disposition des plantes n’y était sans doute pas uniforme, c’est un point en tous cas sur lequel nous sommes mal renseignés.

Quoi qu’il en soit, une conclusion s’impose. La signification d’un rendement à l’unité de surface dépend de la dimension des parcelles, de leur forme, et de la façon dont les plantes y sont disposées. Ce qui veut dire que d’une agriculture à l’autre, dans lesquelles ces paramètres sont différents, les rendements à l’hectare ne sont pas comparables.

Référence

Sigaut F., 1992. Rendements, semis et fertilité. Signification analytique des rendements. In : Patricia Anderson, ed, Préhistoire de l'agriculture : nouvelles approches expérimentales et ethnographiques. CNRS, Paris : 395-403.


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